mardi 28 décembre 2010

Morceaux choisis

Travailler de six heures du matin, à jeun, à midi. Travailler en aveugle, sans but, comme un fou. Nous verrons le résultat.
Je suppose que j'attache ma destinée à un travail non interrompu de plusieurs heures.
Tout est réparable. Il est encore temps. Qui sait même si des plaisirs nouveaux... ?
Gloire, payement de mes dettes.
Je n'ai pas encore connu le plaisir d'un plan réalisé.
Puissance de l'idée fixe, puissance de l'espérance.
L'habitude d'accomplir le devoir chasse la peur.
Il faut vouloir rêver et savoir rêver. Évocation de l'inspiration. Art magique. Se mettre tout de suite à écrire. Je raisonne trop.
Travail immédiat, même mauvais, vaut mieux que la rêverie.
Une suite de petites volontés fait un gros résultat.
Tout recul de la volonté est une parcelle de substance perdue. Combien donc l'hésitation est prodigue ! Et qu'on juge de l'immensité de l'effort final nécessaire pour réparer tant de pertes !

A chaque minute nous sommes écrasés par l'idée et la sensation du temps. Et il n'y a que deux moyens pour échapper à ce cauchemar, pour l'oublier : le plaisir et le travail. Le plaisir nous use. Le travail nous fortifie. Choisissons.
Plus nous nous servons d'un de ces moyens, plus l'autre nous inspire de répugnance.
On ne peut oublier le temps qu'en s'en servant.
Tout ne se fait que peu à peu.

Plus on veut, mieux on veut.
Plus on travaille, mieux on travaille et plus on veut travailler.
Plus on produit, plus on devient fécond.
Après une débauche, on se sent toujours plus seul, plus abandonné.
Au moral comme au physique, j'ai toujours eu la sensation du gouffre, non seulement du gouffre du sommeil, mais du gouffre de l'action, du rêve, du souvenir, du désir, du regret, du remords, du beau, du nombre, etc.
J'ai cultivé mon hystérie avec jouissance et terreur. Maintenant, j'ai toujours le vertige, et aujourd'hui, 23 janvier 1862, j'ai subi un singulier avertissement, j'ai senti passer sur moi le vent de l'aile de l'imbécillité.

***
J'ai cru me lire...

mardi 21 décembre 2010

Bientôt arrivée

Tout va toujours au ralenti, jusqu'à ce que je m'aperçoive que tout est déjà fini, que les dates butoirs buttent pour de vrai. La nuit continue d'être omniprésente, même le jour où elle se manifeste par un brouillard impénétrable. Je me sens un peu comme un coureur de marathon en fin de course, sauf que c'est mon cerveau qui se sent comme ça. C'est le moment, je suppose, de sortir l'effort final, dépasser ses limites, etc. Quand je ne sais plus quoi faire de moi, je passe un bon bout de temps dans la salle de bain. Comme ça, si le cerveau est en bordel, ça ne se voit pas sur moi (mais dans mon appartement, si). On se dit que ça ne va jamais finir, et ça finit trop vite. Chaque fois c'est cris et panique et alarmes, et puis ça s'éteint et je ne vois pas que j'arrive inéluctablement à la ligne d'arrivée, je continue à compter sur la distance qui m'en sépare.
Lassitude, oui, je crois que c'est ça. Et pourtant, j'adore ce que je fais (enfin, un peu moins recopier des citations et insérer d'innombrables notes de bas de pages). Mais bon, il y a toujours des étapes comme celles-ci dans la vie. Si un jour je publie des romans, ce sera pareil. Aujourd'hui, je suis tout de même nettement plus sereine, ne me fixant qu'une seule obligation : faire de mon mieux. C'est déjà pas mal.
Je me sens un peu embrouillée parce que j'ai envie de repartir, j'ai envie d'attaquer d'autres choses, mais, mais, il faut d'abord finir. Ça doit être pour ça que j'ai tant de choses inachevées : parce que l'étape finale, quand on est fatigué, c'est la plus difficile. Et bien, je vous dis un truc, que ce soit pour mon mémoire ou pour mon roman, cette fois, je vais finir.

vendredi 5 novembre 2010

A mon tour !

Voilà, je pique le questionnaire de Kalys qui l'a elle-même piqué sur un autre blog.
A vous ! :)

Musicien que vous admirez le plus : Ben je suppose que c'est Mustis, l'ancien claviériste de Dimmu Borgir, car il a énormément apporté à ce groupe. C'est une personne toujours discrète, qui a beaucoup de classe, et j'espère qu'il aura une belle carrière solo. Sinon, c'est le violoniste de Ashram, qui m'a coupé le souffle en live.
Auteur que vous admirez le plus : Hum... Difficile à dire. Je pense que c'est Baudelaire, en tant que remarquable témoin de son époque, et en tant que visionnaire, et bien sûr en tant que poète. Sans arrêt, je me réfère à lui dans ma manière de penser la littérature et l'écriture, alors...

Groupe ou artiste ayant le plus compté pendant votre adolescence (5 max) : Mylène Farmer, My Ruin, Marilyn Manson, Saez, Korn

Ecrivains... Poppy Z. Brite, Alessandro Baricco, Anaïs Nin, Jean Anouilh, Anne Rice

Styles / Genres favoris : black metal, bandes originales de film, musiques symphoniques en général, musiques folkloriques ; épouvante, fantastique, heroic fantasy

Un album, un livre : Puritanical Euphoric Misanthropia, de Dimmu Borgir, Tropique du Cancer, Henry Miller.

Une chanson, une nouvelle : Enlightment, de Totalselfhatred, Regarde vers l'Ouest, de Lionel Davoust.

Une œuvre classique : le Requiem de Mozart, la 5ème symphonie de Beethoven, les nocturnes de Chopin, les Quatre saisons de Vivaldi. Andromaque de Racine, A Rebours de Huysmans, Zola pour l'ensemble de ses descriptions de paysages et choses à manger :), Voyage au bout de la nuit de Céline, Les Fleurs du Mal, les nouvelles de Poe et de Hawthorne.

Groupes ou artistes, écrivains, vous ayant le plus marqué dans votre vie, par ordre d'apparition, 15 max :
Mylène Farmer, Jean Ferrat, Nougaro, Noir Désir, Marilyn Manson, Dimmu Borgir, Nine Inch Nails, Anathema, The Old Dead Tree, Corvus Corax, Hans Zimmer, Howard Shore
Lewis Caroll, Baudelaire, Baricco, Céline, Henry Miller, Clive Barker, Stephen King, Sire Cédric, Michael Moorcock, David Gemmell, Huysmans, Giono, Anouilh, Racine, Le Guilloux, Castaneda

L'artiste qui vous a le plus fasciné en live : Je pense que c'est Corvus Corax. Une présence extraordinaire, et l'impression de participer à une bacchanale... Rarement ressenti une telle euphorie. Je me souviens que côté fascination, le concert de Queen Adreena, c'était quelque chose. Et Punish Yourself aussi.
En live, oui, moi aussi, j'ai été fascinée par Sire Cédric :D

Plaisirs coupables... Elvis Presley (je sais qu'on dit que c'est le King tout ça mais pour moi ça reste de la pop), Pascal Obispo et David Hallyday (ahah, ça, au moins, je suis sure que certains l'ignoraient !) Et puis tout ce qui est années 80, enfin en bref, tout ce qui me permet de chanter en conduisant ou en faisant le ménage. En bouquins, hum je vois pas trop, j'ai honte de rien je crois :)

Jouez-vous, ou avez-vous joué d'un instrument : pas du tout, je n'ai pas d'oreille et pas le sens du rythme, je suis bonne à rien, et je le sais, car je me suis essayé au clavier.

Ce que vous préférez en musique et en littérature : en musique, c'est la puissance. Le fait que ce soit grandiose, que je me sente sortie de moi-même, en transe.
En littérature, c'est que je me prenne une révélation dans la figure par la beauté du texte et ce qu'il arrive à exprimer (réussir à vraiment dire quelque chose d'important avec des mots, c'est toujours pour moi un tour de force).

Par quel biais découvrez-vous de nouveaux artistes et écrivains : par des magazines : D-Side, Metallian, également Youtube, Lastfm, et les amis :) Egalement pendant les festivals, où je découvre de plus en plus de très bonnes choses.

Lisez-vous la presse musicale / littéraire : musicale seulement.

Combien de temps passez-vous à écouter de la musique et à lire : difficile à estimer. Vu que je suis étudiante en Lettres, la lecture ça doit être pas loin des 6h par jour. La musique, souvent je l'écoute quand je bosse, et j'en écoute somme toute pas mal. Donc disons 8h par jour :) (non, je regarde la télé en bossant aussi, alors ça dépend des jours)

Musicien / écrivain respecté que vous n'avez jamais supporté : Brassens !! Pom-popom-popom,
Pom-popom-popom, Pom-popom-popom
Dickens ! Chiant à mourir.

Styles musicaux que vous détestez le plus : ragga, reggea, rnb, hardcore, trash metal. En littérature, je suis perplexe quand on me parte d'autobiographies et de bit-lit, mais je déteste pas non plus (d'ailleurs je lis une série de bit-lit, mais avant le mot existait pas)

Genre qui ne vous a jamais touché mais que vous ne méprisez pas pour autant : le jazz. En bouquins, vraiment, je lis un peu de tout...

Ce qui vous rebute le plus : eh bien... quand c'est moche. Quand c'est convenu, quand c'est trop expérimental/conceptuel. Valables pour la musique et la littérature.

Musiciens et écrivains que vous détestez viscéralement, 5 max : bah je m'aperçois que je ne sais pas trop quoi répondre. Détester viscéralement, ça m'arrive pas souvent. J'ai horreur de Lavoine, Laurent Voulzy, et toute cette vague de petits chanteurs à succès faciles, sans texte et sans musique. En littérature, je ne vois pas. Il y a des auteurs dont je me méfie. J'ai lu des extraits de Gavalda et Levy et trouvé ça carrément mal écrit.

Trois tubes / best-sellers que vous haïssez plus que tout : Libérer la libertad ou je sais pas trop quoi, Peps, je crois. Mais sinon je me souviens plus, j'écoute pas trop la radio et j'ai pas retenu les trucs qui m'agaçaient. Je lis pas des masses de best sellers, ou alors, je les aime bien.

Pour finir sur une note positive, vos trois grandes claques de l'année : le dernier album de Dimmu, Sisters of Mercy (redécouverte), Negura Bunget découverts en live au Hellfest (black atmosphérique à influences folkloriques roumain)
En bouquins, Duma Key de Stephen King, sinon pas vraiment de coup de coeur neuf cette année (je lis pas tant de romans que ça en ce moment)

vendredi 15 octobre 2010

Le blues de l'étudiante

Chaque année, c'est un constat en demi-teintes qui s'impose. Après l'enthousiasme de la rentrée, des débuts, revient ce sentiment de solitude et d'anonymat. Je suis toujours à la fac sans y être vraiment. Dans la semaine, j'ai un seul cours qui m'intéresse vraiment. On me demande d'aller à des séminaires qui se déroulent entre des spécialistes pour des spécialistes. Ce qui s'étudie à la fac ne sort pas de la fac (du moins pour les Lettres). J'aime les études, je suis passionnée de littérature, c'est pour ça que je m'acharne à aller au bout de mon cursus. Et je suis là, à dresser courageusement mes plannings, et j'ai l'impression d'être mon propre prof, j'ai l'impression d'avoir en charge tout ce que je fais. Non que ce soit déplaisant en soi, on n'a de comptes à rendre qu'à soi-même. J'attendais le retour de la fac pour retrouver un cadre. Mais pour autant, je ne serais pas prête à m'inscrire en assidu en anglais, histoire d'aller à la fac, d'avoir des heures de cours, de me faire des amis là-bas. Je ne sais plus trop ce que je veux, à vrai dire. Travailler ? Ce qui m'effraie dans le travail, c'est la routine totale, le fait d'y aller tous les jours, à telle heure, de ne pas avoir de place pour l'improvisation, pour décider de faire une chose plutôt qu'une autre. Alors j'essaie de profiter de ma condition d'étudiante, et dans l'ensemble ça roule, mais il y a des jours comme ça où on se sent au beau milieu d'un océan de projets, de choses commencées, de listes de livres à lire, et on se sent... désemparé. Un master, ce n'est QUE de l'investissement personnel. Et je trouve ça formateur aussi, ça apprend l'autodiscipline, dont j'ai besoin pour l'écriture. ça apprend à se faire confiance, à être autonome, assez régulier.
Et puis, bien sûr, avec tout ça je me suis mis beaucoup de pression, et tout à l'heure à la bibliothèque j'ai failli pleurer quand on m'a dit que mes bouquins avaient 10 jours de retard (ce qui signifie une interdiction de prêt de dix jours). J'ai peur, bien sûr, de ne pas réussir. De lâcher prise. J'ai peur que ce soit trop pour moi.
Je n'ai pas envie qu'on soit sur mon dos, je n'ai pas envie d'emplois du temps fixe, et c'est pour ça que je trouve mon compte dans ce que je fais. C'est juste que c'est pas facile tous les jours et des fois je me demande si je fais vraiment ce qu'il faut. Difficile d'avoir de l'auto-satisfaction, de cultiver l'auto-satisfaction, plutôt. Déjà, on est seul à être satisfait. J'essaie pour garder la motivation de me fixer des petits objectifs tous les jours. ça fonctionne assez bien.
J'espère que tout cela mènera à quelque chose. J'espère que je suis vraiment capable de faire ce à quoi je me suis engagée, j'espère que je ne me leurre pas sur moi-même. (double cursus, faire mon mémoire, faire de la traduction, continuer à écrire, et avoir quelques heures d'activité rémunérée...).
Enfin voilà, je vais continuer à mener ma barque et décomposer les grandes tâches difficiles en petites tâches faciles, en espérant que ça passe.

mardi 12 octobre 2010

Abrahadabra

Ecoute en direct du dernier Dimmu !

Xibir.

Une ouverture spectrale, j'ai l'impression d'entendre l'introduction d'un film d'horreur, avec cette musicalité, ces harmonies propres au groupe. Onirique.

Born Treacherous.

Une guitare assez agressive débute le deuxième morceau. On part en vitesse, avec un fond orchestral un rien grandiloquent pour ce qu'il y a devant. Il y a toujours ce côté incantatoire, urgent, démoniaque, messianique. Je reconnais des rythmes, des escaliers, des ralentissements, propres au groupe encore une fois. Ça s'affine. Ça s'organise. Une pause. On retombe dans le film d'horreur. Un sample, on dirait un prêtre qui récite quelque chose en latin. On reprend. C'est théâtral. Un bizarre chant clair se greffe. Atmosphère presque mystique. Là, les guitares recommencent à marteler. Il y a là-dedans un mélange hétéroclite plutôt surprenant. On ne sait plus trop où tendre l'oreille. Une superbe composition avec des instruments à corde qui ondoie en arrière plan. Une fin de morceau très très black.

Gateways.

On saute à l'autre morceau, avec un cadre très Spiritual Black Dimension, genre chute dans les abysses. Les guitares grincent comme le blizzard. On revient dans quelque chose de très baroque, je n'arrive pas encore à savoir si c'est bancal. Ça tressaute, ça s'envole, ça retombe, ça chevauche. Il y a une voix mi enfantine, mi féminine, qui s'élève bizarrement là où se déchaînait autrefois le superbe chant clair du bassiste (qui a été viré avec son confrère claviériste). Un petit solo de guitare pour la forme, rythmé martialement typiquement dans les harmonies du groupe. Et on repart dans cette tourmente musicale qui n'est pas sans m'évoquer les albums les plus bariolés d'Emperor. Et hop, on repart dans une structure très très épique. Un choeur féminin, chose jamais entendue encore chez Dimmu. Plutôt joli. Ça se calme, toutes les voix repartent, car il y a aussi des voix d'hommes. Jamais eu autant de chant chez Dimmu.

Chess With the Abyss.

Intro typique black metal. Des chants enchaînent, puis une ligne de voix de Shaggrath je dirais presque...joueuse. Là, il nous raconte quelque chose, il sort du pur chant black. Quelques expérimentations de guitares. On reprend le rythme, scandé par le choeur. Et on renvoit de l'orchestre, totalement grandiloquent et pourtant séduisant. On part dans un rêve de scientifique fou. Ou de sorcier ayant un peu trop consommé.

Dimmu Borgir.

Un rythme entraînant et une orchestration qui me fait penser à celle de Inactive Messiah sur leur album Be my Drug. On a là une chanson plus « posée », qui va plus dans un seul sens me semble-t-il. Ça a quelque chose de heavy aussi, très harangue au combat, genre hymne guerrier. Plutôt pas mal ! Assez surprenant là encore, Dimmu n'avait jamais rien fait d'aussi « lumineux ». Ah, et Shaggrath remet son rire diabolique, ça c'est bien sympa !

Ritualist.

Ah, ça commence par du vent. So norwegian ! Et là, surprise, une guitare accoustique. Un fond black, plutôt atmosphérique, se développe derrière. Changement de rythme, bouffées glaciales d'instruments à corde. Il y a un côté presque fantaisie, presque Alice au Pays des Merveilles, dans le son explosif, diversifié, rempli d'arabesques inattendues. Ça bouge dans tous les sens. C'est du pur Dimmu Borgir, et en même temps, on dirait qu'ils ont pris le meilleur de Cradle of Filth et ajouté une sensibilité à la magie et aux sortilèges des contes... Le chant clair du bassiste est remplacé par un autre chant pas forcément très beau, mais toujours dans des passages très narratifs. La question est : ne risquons-nous pas de nous y perdre ? Superbe accélération aux guitares électriques pour reprendre le fil de l'histoire. Oui, cet album est incroyablement narratif. Il est constitué de chapitres, de passages, de dialogues, de tirades, aussi bien instrumentales que vocales. Et il y a une certaine pureté non artificielle du son, amenée par la présence de vrais instruments, et ça, indéniablement ça s'entend, et c'est aussi ça qui donne cette qualité baroque.

The Demiurge Molecule.

Un rythme entêtant, redondant, s'installe au début de la chanson. Puis, quelque chose qui grince. Et le balancement revient, ce nouveau groove que le groupe a acquis avec Puratinical Euphoric Misanthropia et qui leur va si bien, quand ils n'en font pas un trash death du plus mauvais effet. Ici ça martèle, comme dans les meilleurs moments de l'album su-cité. Ça envoie pas mal, je dois dire. C'est aussi grandiose et dingue que Drudenhaus de Anorexia Nervosa, un bon son en plus. Je sens d'excellents headbangs en perspective ! Et là, hop ça s'arrête pour une percée d'instruments à vents qui surnagent tout à coup au-dessus de la musique, annonçant on ne sait quelle fin du monde. Et les choeurs, les guitares, l'orchestre, avancent ensemble derrière. On change de tonalité encore une fois, c'est plus intime, la voix se fait insinuante. Ça tressaute, j'ai l'impression d'être au milieu d'un spectacle de marionnettes qui aurait mal tourné, d'un cirque cosmique dont les portes s'ouvrent sur le vide (oui, Dimmu ça m'a toujours rendue poète).

A Jew Traced through Coal.

Un départ doux, comme la première scène d'un film d'horreur où l'on filme le lieu où tout va se jouer. Puis la chose se noue, encore très très black dans les rythmes et les riffs. C'est-à-dire, car il faudrait que je m'explique un peu : rapide, et puis c'est cette qualité de son inimitable, propre au black, là faut écouter pour savoir. C'est cette manière de jouer, à la fois lancinante et pressée, comme douloureuse. Au coeur du morceau il y a quelque chose d'extraordinaire, une orchestration qui rappelle The Serpentine Offering (et donc Star Wars selon certains). Mais c'est moins ample, c'est plus resserré, et très vite on change encore de tonalité, de rythme. Non, malgré tout il y a une certaine cohérence dans cette profusion. Je ne perds pas le fil mais suis emmenée dans toutes les directions. Je dois dire que c'est une expérience musicale.

Renewal.

Pour la prochaine, là encore on entre dans un truc très heavy, avec un solo de guitare plus heavy que black, le genre qu'on joue pour le plaisir d'entendre sa guitare, cela dit ça n'empêche pas qu'il soit chouette, ce solo. Et là encore, mélange des genres, on repart dans un méchant black pour le coup un peu moins mélodique. On est perpétuellement dérouté. La scène et les acteurs changent sans arrêt. Malgré tout, c'est efficace. Je me prends à remuer la tête. Là encore, je repense à Puritanical Euphoric Misanthropia (je le précise cette fois, l'un des meilleurs albums du groupe, aux côtés de Spiritual Black Dimension déjà évoqué).

Endings and continuations.

Avec un sample pour le moins louche (des bruits humides et quelque chose qui ressemble à une mastication), on entend encore ce chant profond, bas, qui fait penser au chant de Wardruna. Vous savez, ce chant un peu chamanique du genre « oooouaaaaaaaaaammmmmm » (c'est bien imité, hein). Et hop, après, un truc presque sautillant, enthousiaste comme une symphonie. Je viens d'apprendre que le bassiste de Therion était présent sur cet album, ce qui peut expliquer certains aspects musicaux. D'ailleurs je crois que c'est lui qui fait le chant clair sur ce morceau. Celui-là est bien maîtrisé, mais très inattendu dans un morceau de black metal. Là encore on a quelque chose de très hétéroclite, qui emprunte au folk, au heavy, au black, à la musique classique. Étonnant.

Gateways (orchestral)

On commence par des choeurs éthérés, on dirait presque une messe. Et là, ce que Dimmu fait de mieux éclate. C'est lumineux, déroutant, tragique et épique à la fois, une histoire dans une nuit très noire, avec des armes au clair qui brillent dans la lune. Mais les choeurs persistent, apportant une perspective biblique assez étrange. Ça se rapproche, en fait, d'un requiem. D'un opéra fantastique. D'une symphonie macabre. Ça s'élève, la tension monte. Vont-ils soutenir ce morceau jusqu'au bout, l'amener à son aboutissement ? Il continue de rouler, spectral. Il se reprend, respire, ou plutôt halète. Un épisode très doux, poignant, et toujours environné de fumées et de doutes. Ça valse dans l'air obscur. On dirait une musique de film. Ça s'effondre dans le murmure d'un rêve.

Perfect Strangers.


Et enfin, quelque chose que j'attendais : une reprise de Deep Purple. Sans commentaires, je vous laisse découvrir.


Bilan : sur le vif, album très surprenant qui effectivement marque une page dans l'histoire du groupe. Me manque un petit quelque chose cependant : la force de certaines lignes mélodiques qui ont tendance à ici se noyer. Les moments de suspension, la structure parfaite des morceaux de Spiritual Black Dimension, qui frôlaient la perfection parfois, même avec un simple clavier. La pureté mélodique, oui, c'est peut-être ça qui manque.
Cependant, un album qui porte bien son nom, et un bel album après la perte de deux musiciens très talentueux. Bonne surprise.

Deux morceaux :





Pour ceux que ça intéresse, références citées :







mardi 5 octobre 2010

Automne

En automne, ça sent la forêt dans toute la ville. Le ciel est bas et gris, mais ce ciel-là me raconte des histoires. Infailliblement, je pense à des histoires de chevaliers et de fées, je pense à des sorcières, je pense à du chocolat chaud et des goûters à la maison, je pense à des livres pas encore ouverts, à des promenades dans le parc dans des allées pleines de feuilles mortes. L'automne, c'est la saison des études, des secrets, et des histoires.


La nuit m'effraiera toujours. Quatre jours que la pluie tombe, brouillant l'horizon et les silhouettes. Tout est humide, du coup, il fait froid. Ce froid insidieux d'automne, plus néfaste que la froideur sèche et vive des mois de janvier ensoleillés. J'en ai profité pour regarder des films au chaud dans le lit, stores baissés. J'aime me cacher du monde entier.
Ce soir, j'ai allumé plus de lumières, et une petite bougie, rouge à travers sa fleur de verre, car la lumière enveloppe et rassure. Il fait trop froid sans lumière. Les journées passent, et je m'accroche, et je parviens à des résultats, mais je ne dois pas tant voir dans la durée. Tout peut s'arrêter du jour au lendemain. Il me faut une vision plus globale, moins axée sur la réalisation, même si c'est capital car malgré toutes les théories philosophiques, je vis quand même dans un temps linéaire. Enfin, d'une certaine façon en tout cas. Au plan social, au plan quotidien. Ce sont les autres plans qui peuvent m'aider à me détacher de cette compétition générale, de cette urgence du temps et de cette nécessité de faire ses preuves pour ne pas vivre une vie trop moche.
Ne jamais oublier l'essentiel. Sans quoi je me transformerai en zombie, comme tous les autres. Des zombies qu'un coup du sort réduit en poussière. Je ne veux pas laisser la vie m'avaler. Je préférerais plutôt la dévorer. La faire mienne. Non pas la contrôler, je ne le peux pas, pas dans l'absolu, mais... Le oui. La volonté de puissance nietzschéenne. Le oui inconditionnel. Car, il n'y pas de demi-mesure. C'est oui c'est non. Sinon c'est se condamner à la demi-vie.

jeudi 16 septembre 2010

Je suis Mme Bovary et Don Quichotte...

...Et j'assume !
L'une des musiques que j'aime le plus avec l'un des films que j'aime le plus...



(Mis à part l'apparté à l'initiative du créateur... Chacun son point de vue :) )

Tant qu'on est dans les trucs de fan... Cette musique ne cessera de m'inspirer. Hans Zimmer est un grand, très grand.

mardi 14 septembre 2010

Nocturne II

Croix du Sud.

Lumière dorée et penchée sur la ville mettant en relief la façade classique de République. Les rues sont animées, avec des groupes de gens concentrés sur les terrasses comme un vol d'oiseau abattu sur un champ de bières. Pas toujours bonnes, ces bières, mais elles ont la fraîcheur des fins de journées,les bulles de sa légèreté. Tout à l'heure, au carrefour, j'ai vu la lumière s'épaissir dans les arbres au bout de la rue, scintillante comme du miel. Tout palpite et la soirée est tiède.

Quelques heures plus tard.

La nuit a fraîchi l'air, mais la ville reste vivante et pleine. Les gens marchent d'un pas pressé, les terrasses sont toujours remplies, mais ce sont des personnes différentes. Les bars sont chaleureux, des points d'ancrage et de lumière, des balises nocturnes où trouver un réconfort et des amis autour d'une bière.
Je regarde l'eau scintiller sous le pont, et puis ce grand bouleau planté dans le béton dont je me rappelle que l'année précédente, il avait attendu décembre pour abandonner la bataille et se dénuder totalement.
Je suis chez moi.

Rentrée à la maison, la fatigue me pèse un peu sur les épaules et forme une raideur dans mon cou, mais j'ai la musique dans la tête. j'ai hésité entre un café et une tisane, pris une tisane, et me demande si ma rêverie va me porter. Sinon, il y aura un film ou du sommeil, mais je veux laisser sa chance à la brûlure, à la blessure sensible qui crépite la nuit venue.

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Marcher sur le trottoir sans avoir les pieds sur terre. Avoir des scénarios dans la tête, des images fantastiques. Au fond de soi puiser la sérénité d'être ancré dans son corps dont les coutures craquent pourtant. On pourrait se répandre sur le béton, ou s'envoler en fumée, un corps dansant parmi les autres, que seul le souffle d'une quelconque divinité permet de connaître cet état qu'on nomme la vie. Si fragile et dérisoire, c'est aussi cela, se sentir fort : vivre comme un souffle, courant sur la terre, se mélangeant aux autres odeurs et à tous les soupirs. Savoir que rien de tout cela n'a réellement d'importance. C'est grisant. Traverser la nuit, ces quelques heures au fond desquelles appellent avec insistance le sommeil et le rêve, et se sentir léger, dérisoire, fragile, sans importance. Libre de n'être rien, et d'être tout.
J'ai toujours cette phrase idiote dans la tête, ces temps-ci : "dans la vie, faut pas s'en faire". Je pense au sourire que j'étais la seule à avoir ce matin, en cours. Je suis curieuse. Le monde satisfait ma curiosité. Je prends le temps d'être. C'est tout.

mercredi 8 septembre 2010

Nocturne...



Ça monte avec la nuit, nourri d'ombre. Les propos de Jankélévitch me donnent la chair de poule, chose tellement rare en littérature ! La musique entre en moi et me violente, mais les mots rarement parviennent à me secouer par leur seule force poétique. La dernière fois, c'était quand ? Il faudrait plutôt dire, c'était qui. Nietzsche, Généalogie de la morale. Baudelaire, encore, toujours. Henry Miller, Jean Giono. Leurs passions dionysiaques allument le feu de Dieu en moi. Alessandro Baricco, probablement, aussi.
Avez-vous déjà eu des frissons en lisant un livre ?
J'en ai eu au début de Duma Key, de Stephen King. L'acte créateur était saisi dans sa brutalité, son essence. La voix de l'écrivain débordait tellement dans celle de son personnage, j'avais l'impression qu'il me parlait directement. (c'est un livre, au passage, servi pour une fois par une bonne traduction).
Je vous offre ces mots de Jankélévitch. Je cherche, et ne lui trouve pas d'activité poétique, seulement critique et théoricien... Comme c'est étrange ! Jugez par vous-mêmes :
« L'obscurité est bonne conductrice : dans le noir toutes sortes de communications magiques se nouent entre les âmes ; et le courant n'exige plus, pour passer, des moyens termes au contact, mais il s'établit aussi immédiatement que l'éclair ; véhicule de toutes les puissances « sympathétiques » du monde, il circule entre les âmes, comme circulent, dans l'éther, les influences astrales. La nuit, c'est l'immanence. Le sabbat des qualités, qui se célèbre à minuit, rend vraisemblables les analogies les plus bizarres, les calembours et les accouplements les plus saugrenus. A minuit tout est permis ; n'importe quoi déteint sur n'importe quoi, et chaque être participe de tous les êtres. Comme l'imagination devient légère et merveilleusement absurde au clair de lune ! La voici qui gambade avec les salamandres et les esprits élémentaires dans la prairie violette, qui respire à pleine poitrine le fluide de minuit... Finis, les travaux forcés de la médiation, et la patience, et le labeur, et l'étroitesse ! L'armée immense des possibles envahit les chemins de la causalité, et les contradictoires nouent dans l'ombre toutes sortes de pactes occultes. »

« Ainsi l'âme romantique n'est plus isolée dans le monde : en revenant aux nains et aux esprits de la terre, elle a guéri la solitude où trois siècles de civilisation classique avaient laissé le romantisme français. Pour se guérir tout à fait et entendre les conseils qui viennent du fond de l'occident, il faut aimer beaucoup la nuit, la chercher même durant le jour, là où on peut la trouver, dans les forêts et dans les cathédrales. « La nuit est profonde là-bas » ; mais elle est affectueuse, transparente et fraternelle. Le mystère de la nuit ne se révèlera pas aux bourgeois qui la passent à dormir dans leur lit, mais seulement aux fantasques qui cherchent l'ombre parce qu'ils ont trop aimé la lumière. »

samedi 4 septembre 2010

Liberté égalité fraternité ?! J'aime toujours mon pays malgré tout... alors...

je viens de me rendre compte que la manif à laquelle je voulais me rendre, c'était aujourd'hui. Forcément, c'est moins médiatisé que le scandale d'avoir à travailler deux ans de plus (même si c'est plus compliqué que ça, je sais)
Je vous invite à signer l'appel...

Appel Citoyen
Face à la xénophobie et à la politique du pilori : liberté, égalité, fraternité

Signez l’appel en ligne !

Les plus hautes autorités de l’Etat ont fait le choix de jeter à la vindicte publique des catégories entières de population : Roms et Gens du voyage accusés comme les étrangers d’être des fauteurs de troubles, Français d’origine étrangère sur lesquels pèserait la menace d’être déchus de leur nationalité, parents d’enfants délinquants, etc. Voici que le président de la République accrédite aussi les vieux mensonges d’une immigration coûteuse et assimilée à la délinquance, et offre ainsi à la stigmatisation des millions de personnes en raison de leur origine ou de leur situation sociale.

Ce qui est à l’œuvre dans cette démarche ne s’inscrit pas dans le débat légitime, dans une démocratie, sur la manière d’assurer la sûreté républicaine. Le nécessaire respect de l’ordre public n’a pas à être utilisé pour créer des distinctions entre les habitants de ce pays et désigner des boucs émissaires, ni pour instituer des peines de prison automatiques, contraires aux principes fondamentaux du droit pénal, à l’indépendance de la justice et à l’individualisation des peines.

La Constitution de la France, République laïque, démocratique et sociale, assure « l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion ».

Nul, pas plus les élus de la nation que quiconque, n’a le droit de fouler au pied la Constitution et les principes les plus fondamentaux de la République.

Notre conscience nous interdit de nous taire et de laisser faire ce qui conduit à mettre en péril la paix civile.

Nous appelons à une manifestation le samedi 4 septembre 2010, place de la République à Paris, à 14h00, et partout en France, afin de fêter le 140e anniversaire d’une République que nous voulons plus que jamais, libre, égale et fraternelle.

C'est ici

vendredi 27 août 2010

Ewiges Licht



Ce qui est étrange, c'est que le temps, et les moments de la journée qui le composent, semblent rouler comme un fleuve, au-dessus de quelque chose, ou à travers quelque chose, que le temps ne fait que traverser. Nous vivons en surface, la plupart du temps, ignorants et aveugles. Parfois, le fleuve s'ouvre en deux. Et nous avons un aperçu de l'entre-deux, des couloirs qui éclairent le vide, du nagual et du sacré. Certains le traduisent par le mot "lumière", faute de métaphore. D'autres par une simple expression "a warm place".
Ma quête, mon unique quête, est impossible et vouée à l'échec. Parler de cet entre-deux. Certaines personnes pourraient me juger mystique mais il m'a toujours semblé, à la manière du film Matrix, ou Avalon, que la réalité, ce que nous appelons réalité, n'était qu'une grossière illusion. Truth is out there...

Don Juan a dit à Castaneda que les drogues étaient une béquille. Je crois que j'aurai besoin de ma drogue personnelle pendant très longtemps encore, si ce n'est toujours. La drogue a toujours été un élément clé du rituel et de la transe. Ce n'est pas par hasard. Il semble qu'elle aide à ouvrir les portes de la perception... Chevaucher les esprits. La folie.
Je crois à la division du sacré et du profane. Il me semble maintenant évident que le profane ayant envahi jusqu'aux valeurs morales, nous sommes conditionnés à l'ignorance sourde et aveugle de son pendant, le sacré. J'ai l'impression que mon éducation m'a forcé à l'évacuer comme une mauvaise habitude. Et j'ai envie de révolutionner cela. Je me rends compte que ce que je sens si fort en moi ne peut être considéré comme un délire personnel que si moi je prends la décision de le juger ainsi. Ce chemin n'appartient qu'à moi. Personne ne peut vous imposer une voie spirituelle. Jamais. On ne vit pas sa vie spirituelle par la crainte ou la force. En ce cas, on fait semblant de la vivre.
Bon, pour éteindre vos éventuels doutes, mais je pense que vous l'avez déjà compris, je ne me suis convertie à aucune religion. J'ai juste décidé de laisser parler ma nature profonde, au lieu de l'enfouir inutilement. Il ne s'agit pas d'une opposition rationnel/irrationnel. ça me semble presque basique et puéril, comme opposition. Je ne cesse d'analyser mes perceptions du "sacré" de l'entre-deux, de la lumière. Elles n'ont pas un fondement irrationnel. Elles appartiennent à une vérité qui me dépasse. Ou une vérité que j'invente. Mais fondamentalement, y a-t-il réellement une différente entre ce qu'on invente et ce sur quoi tout le monde est d'accord pour lui attribuer le statut "d'existence" ? Je crois que la réalité est, et doit, être plus malléable que ça. Pourquoi le doit-elle ? Parce que figer la réalité est la trahir, et c'est justement anti-scientifique et anti-philosophique. Le meilleur moyen de savoir est de tomber dans le terrier du lapin. Le meilleur moyen de connaître est d'abandonner ce que l'on sait, ou plutôt ce que l'on croit savoir, car que sait-on vraiment ? On ne sait que ce qu'on est habitué à savoir.

mardi 24 août 2010

Lost in the dusk

Le jour s'en va lentement. Stephen King, dans Duma Key, dit que l'artiste doit être affamé pour produire. A prendre au sens littéral aussi bien que métaphorique, je crois. Je suis affamée, normal, j'ai mangé à midi pour une fois, et pour une fois, je suis allée me promener un peu. J'ai commencé à écrire un peu au hasard, pour voir si quelque chose venait, car mon heure d'écriture est désormais plus ou moins calée au début de soirée, pendant l'apéro, avant de manger. J'ai écrit un peu, tous les jours. Pour le moment, ça me convient plutôt bien. C'est l'ouverture des portes de l'imaginaire, avant le vide de la nuit, après les préoccupations autres du jour cru et peuplé. Le crépuscule sera-t-il mon moment ? Je ne crois pas que quoique ce soit soit fixe, disons que pour l'instant ça me convient. J'apprécie la vue immense que j'ai du ciel, ici. Je peux voir les nuages se déployer et traîner à travers le ciel, déclinant les formes et les couleurs à mesure que le vent les fait vivre. La forêt continue de se tapir à l'horizon.
Je commence à trouver mes portes d'entrée dans l'écriture, celles qui me font oublier la famine et le doute. Je commence à comprendre comment écrire, même sans idée, même sans cette poussée monstrueuse, cette pression intérieure qui parfois me rend folle et m'empêche carrément d'écrire. Désormais, j'apprends à provoquer le jaillissement, et non à l'attendre.
Présentement les nuages prennent une couleur soufrée tandis que des vapeurs légères, comme des fumerolles, se détachent de leurs corps massifs.
Pour écrire, il ne faut pas chercher quelque chose de précis. Ne fais pas le geste de tendre le bras, c'est la seule manière d'obtenir quelque chose. C'est une quelconque déformation d'une pensée bouddhiste qu'un ami m'a appris, un jour. Ce genre de vérité qu'on teste et qu'on défie toute sa vie, et cette vérité prend une profondeur renouvelée avec le temps, chaque fois qu'elle nous revient à l'esprit. Etrange...
Je regarde actuellement la dernière saison de Lost. Ne vous inquiétez pas, je ne vais pas vous spoiler. Mais. C'est la meilleure série que j'ai jamais vue. Et j'entends déjà des voix s'élever un peu partout pour contester cette allégation. Mais je ne parle qu'en mon nom. Parce que, voyez-vous, elle résonne en moi. Comme quand j'ai lu Mathieu Ricard (ancien neuro-biologiste devenu moine bouddhiste et porte-parole du Dalaï-Lama en France), comme quand j'ai lu Carlos Castaneda (si par hasard quelqu'un qui me lit ne le connait pas, je me dois de le lui présenter : étudiant parti faire une thèse sur l'utilisation des drogues hallucinogènes dans les rituels au Mexique, il devient le disciple de Don Juan, un philosophe anonyme, inconnu et... un guerrier, un sorcier.). Comme quand j'ai lu Océan Mer d'Alessandro Baricco et Le Royaume des Devins de Clive Barker. Quand j'ai ressenti les fils de la toile s'entremêler et bouger en moi. Quand j'ai su que tout cela n'était qu'un rêve. Quand j'ai su que la réalité était pleine de trous. Comme quand j'ai vu Mulholland Drive. Quand j'ai redécouvert cette vérité, encore sortie du même ami que tout à l'heure, que la vie n'est que ce qu'on en dit. Que nous ne sommes pas forcés de n'en voir qu'un aspect. Que nous pouvons fouiller les interstices. Un poète tchèque a dit approximativement qu'un poète ne faisait que mettre en lumière ce qui avait toujours été là.
Dans le test, que j'ai refait, je suis encore et toujours Jack. Mais il comprend un truc fondamental dans la dernière saison. Comme lui, je suis longue à la détente. Pour le fun, je vous copie le résultat du test, peut-être me reconnaîtrez-vous un peu. C'est pas si faux sauf que je ne suis pas une leader et que je m'occupe pas tant que ça des autres. I do care, that's all !
Jack
You scored 60% kindness, 43% courage, 39% seedy past, and 54% secretiveness!
"We're not savages, Kate. Not yet."

You are Jack. You are compassionate, heroic, and a bit of a martyr. You are brave and a natural leader. However, you shouldn't keep so much bottled up inside. You are so busy taking care of others that you have no time or energy to take care of yourself. Take a load off once in a while and play some golf with Hurley. You need to relax pretty soon or else you'll be no good for anyone anymore - including yourself!

Your polar opposite is: Shannon. You are similar to: Boone and Sayid.

Oh, si vous voulez le faire aussi : http://www.okcupid.com/tests/take?testid=5052228135609532493

lundi 2 août 2010

Je suis à l'image de mon bureau


Pétard ! (comme dirait ma grand-mère). En ce moment je me noie littéralement dans les corrections. J'ai deux romans à corriger, même si l'un d'entre eux n'est pas achevé, je ne fais que corriger ce qui a déjà été écrit. Mais je n'ai qu'une hâte, c'est de me remettre à écrire. M'enfin... C'est ce que je dis maintenant. Mais l'écriture et moi, c'est l'amour et la haine. Quand je dois écrire, il me semble que mes idées sont merdiques. Et quand je dois me corriger, je me congratule parfois, et je fais la moue, beaucoup.
Bordel !
J'ai commencé une nouvelle pour une anthologie, dont le sujet me plaît beaucoup. Mais combien de temps ça fait que je n'ai pas écrit une nouvelle à moi, hors appel à textes ?
Je m'échine en ce moment pour comprendre comment je fonctionne, trouver ce qui est le mieux pour moi. Je crois que je suis une sacrée bordélique, et je suis pas sure de pouvoir me changer là-dessus. Je crie déjà d'angoisse à l'idée de prendre un repas à heure fixe.
Cela dit, ça ne veut pas dire que je ne peux rien organiser. Figurez-vous que quand on a des tonnes de temps libre, c'est pas forcément plus facile, parce qu'on a aussi une tonne de choses potentielles, en devenir, en attente, en cours, en fin de vie, en correction, en finalisation. Et ça m'emmerderait de ne pas avoir tous ces trucs, parce que je n'arrive pas à me consacrer corps et âme à une seule chose. mais c'est quand même un vaste foutoir. Résultat, tout avance, petit à petit, et si on schématisait ma productivité, ça ressemblerait sans doute aux cours de la bourse.
Putain, (excusez-moi pour la grande vulgarité de ce billet, mais ça défoule), putain, disais-je, en écriture, c'est comme attendre que son whisky veuille bien vieillir pour pouvoir le boire. Pour avoir des résultats, faut pas être pressé. Vraiment pas.
Mais ça finira par marcher, n'est-ce pas ?

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Je suis tombée amoureuse. Ce n'est pas tous les jours qu'on écoute quelque chose qu'on n'a jamais entendu avant.
Scotchant, incroyable.
Les morceaux sont longs mais ce n'est pas une musique qui passe toute seule. C'est une musique qu'il faut écouter. Une musique qui ne se laisse pas aimer du premier coup. La première fois, j'ai été très surprise, enfin, c'est vrai, j'aimais déjà. Mais à la cinquième écoute, j'étais amoureuse :)

http://www.aforestofstars.co.uk/





lundi 19 juillet 2010

Le dilemme d'Antigone, deuxième partie

Peu dormi cette nuit, après un week-end de lâcher prise avec des amis, et des moments précieux. Mais je n'ai pas envie de me coucher. Mathias et Nathalie me manquent ce soir, plus fort que d'habitude encore, je le sens physiquement. Sans eux je vis sans une partie de moi. Personne à part Scott ne me manquera comme ils me manquent. Du coup, je me sens mélancolique, pensive. Je commence à compter les jours avant de partir au Québec.
De toute façon j'attends la nuit, j'attends que la chaleur baisse, j'attends que le jour prenne fin. Trop de lumière. Chaleur lourde. Le jour est oppressant. J'ai envie de m'égarer sur des chemins plus amicaux, noirs et frais, où l'imagination s'élance librement pour modeler le silence.
La fatigue m'aide à rencontrer mon émotion. Nathalie a dit que j'aimais vivre de façon chaotique. Je ne sais pas si j'aime, mais je crois que je ne sais pas tellement vivre autrement. Une des raisons pour lesquelles j'ai du mal à me voir vivre avec quelqu'un d'autre que Scott.
Bonne résolution : arrêter de me plaindre et vivre en assumant mes conneries, en assumant ma difficulté à vivre. Vivre. A ma façon et de mon mieux.
Quand j'essaie d'expliquer à mes amis ce qui est peut-être de l'alcoolisme, je suis juste et à côté à la fois. Je n'y vois pas clair dans ce problème. Mais la première étape est d'accepter ce qu'on est et ce qu'on fait. Après, on peut choisir de changer, ou pas. La santé est importante mais elle est fragile quoiqu'on y fasse. Et la santé ne comble aucun vide. La santé n'aide pas à écrire. La santé fait partie d'un mode de vie auquel je n'atteindrai jamais tout à fait. Tirer des plans sur la comète est inutile. Il faut que j'arrive à me débrouiller, maintenant. Ça faisait longtemps que je n'avais pas eu l'impression de grandir. Ce soir, j'ai cette impression. Je dois me débrouiller seule, à ma façon, et selon mes moyens. Mais je peux le faire. Même si ce n'est pas aussi bien que ce que je pense qu'on attend de moi. Je dois m'en tenir à des objectifs, à des faits. Je veux écrire, je dois écrire. A moi de me débrouiller pour trouver comment. Je ne me connais pas, en fait. Je ne sais pas ce que je peux faire et selon quelles modalités, pour quelque chose qui ne m'est pas expressément demandé, quelque chose que je mets en place toute seule. Je m'aperçois que je ne sais pas comment faire, comment me gérer, comment m'épanouir pleinement. Je dois d'abord trouver ce qui me correspond vraiment, trouver mon rythme et ma manière. Je comprends maintenant que c'est aussi ça, être écrivain. C'est savoir comment écrire, selon sa personnalité, ses contraintes, ses envies, ses ennuis, ses problèmes. Je m'aperçois que je n'ai pas trouvé la vie qui me convenait. Et il est temps. J'arrête les errances, et je travaille sur ce que je veux vraiment, et les moyens de mettre ça en place. J'ai envie de passer à autre chose. De devenir ce que je suis. A vrai dire, je ne pensais pas que le chemin était si long. J'avais naïvement pensé avoir atteint une certaine maturité. Mais c'est faux. C'est un chemin qui traverse toute la vie, et je suis certaine que si j'atteins la quarantaine, la cinquantaine, et après, j'aurai toujours cette impression de grandir.
J'en ai assez de culpabiliser, et d'être insatisfaite. Je veux vivre ma vie. Je veux être moi-même. Je veux donner tout ce que j'ai, car si je ne le fais pas, ma vie n'a pas de sens. C'est ma réponse au dilemme d'Antigone. Je dis oui, mais je m'engage à devenir ce que je suis. La vie, en dehors de ce que je peux y mettre, de ce que je peux en faire, c'est une énorme blague de mauvais goût, c'est moche, et ça peut me mettre au fond du trou rien que d'y penser, cette mélasse quotidienne, cette lassitude, cette monotonie, ce dégoût progressif qui nous ronge jusqu'à ce qu'on ne devienne que des ombres de nous-mêmes. Je suis terrifiée par ça. Tellement terrifiée que je le provoque. En face de la possibilité d'un échec, le provoquer, c'est s'assurer la certitude d'avoir mal. Peut-être est-il plus facile de vivre en se montant la tête avec des futures douleurs, plutôt que de plonger dans l'inconnu, de ne croire à rien, pas même à son propre malheur, pas plus qu'à son propre bonheur. L'inverse est plus difficile, croire à son propre bonheur, c'est s'exposer à de grandes déceptions. Mais marcher en aveugle, c'est peut-être ça qu'on n'arrive pas à faire. Ne dire ni oui, ni non. Vivre. Epuiser sa vie, la consumer, la boire jusqu'à la lie. Sans se demander si on s'empoisonne ou bien si on s'enivre. Je ne supporte pas la fadeur, je n'ai pas envie de devenir fade, résignée, habituée, bien dressée à accepter la misère d'une vie soutenue par des béquilles et lestées par mille fardeaux. C'est au-dessus de mes forces. Je veux vivre. Et ce mot n'implique pas pour moi des devoirs, des responsabilités, des horaires, un bon comportement. Non, ça implique de se jeter dans le gouffre du hasard. D'assumer de ne pas être parfait. De ne pas chercher à être ce qu'on n'est pas. D'habiter son corps jusque dans les moindres extrémités. De pleurer et de rire avec sincérité. Il n'y a aucune règle, aucune loi, aucun schéma de vie. Il n'y a que ce qu'on en dit, et ce qu'on en fait. Je l'avais oublié. Comment ai-je pu ? Mais j'ai oublié. J'ai culpabilisé. Je me suis morfondue. J'ai essayé d'être plus correcte. J'en ai plus qu'assez de cela.
Je dirais que s'il y a un grand mal à notre époque, c'est la culpabilité. On peut choisir le genre de vie qu'on veut, en théorie. En vrai, on aspire tous à des standards. J'en ai plus qu'assez de réduire mes ambitions à un schéma de société.
Je veux devenir ce que je suis.





jeudi 15 juillet 2010

Non

« Une grande tour d'argent et de verre

Se dresse devant moi
Je me dois de la gravir
Atteindre mon but
Toucher le ciel
...Ce Ciel!

Mon premier pas est lourd
Il écrase une marche
Mon second essaye de faire oublier le premier
Ce long escalier qui me jauge a l'air complice avec le ciel et l'infini

Marche après marche, je monte cet enfer
Le vent glacial cisaille ma peau et viole mon antre
Que vais-je trouver en haut?
L'amour, la force la vaillance
Ou peut-être l'espoir, la haine
Peu importe je dois monter
Je dois monter

J'aperçois un aigle
Il grave son nom dans les nuages
Il a l'air libre
Je veux l'atteindre
Je dois l'atteindre

Les gouttes de sueur qui perlent sur mon front
Me rappellent que je ne suis qu'un tas d'os
Un tas d'os & d'eau

Je ne peux plus me reposer
Je ne dois plus m'arreter
Si je veux trouver la paix
Je dois monter

Cent jours ont passé
Je suis enfin au sommet
Ici tout est plus clair
Tout est plus beau
Je surplombe les nuages
Et les anges...

Rien ni personne ne m'y attendait
Ou peut-être, le repos
Je m'assieds doucement
Mes chevilles craquent, Je tombe
Mes yeux se ferment, la fatigue

A présent, je me sens mourir
Et je sais pourquoi je suis venu
Jusqu'ici »



Ça monte en moi comme la marée.
Violent et doux à la fois, c'est un arrachement silencieux du sol et de mes amarres, qui se situent entre mes côtes. Le coeur qui s'accélère, un vertige qui traverse la tête. Les pulsations de la musique qui tapent dans ma poitrine. La musique est comparable à un souvenir. Quand on l'écoute, la nostalgie survient parfois, inattendue car le morceau n'est lié à aucun souvenir, sinon peut-être un souvenir de soi. Ça résonne dans la nuit qui s'est agrandie, ce temple où tant de profanes ont déposé leurs larmes et leurs insomnies.
Je monte, je monte avec les sons, avec la litanie. Comment se finit cette chanson ? Est-ce l'histoire d'un suicide ou d'une révélation ?
Je dois monter...
Je dois monter...
Je ne sais pourquoi ça me bouleverse.
Je dois l'atteindre...
Peut-être parce que je ne cesse de chuter moi ici, de chuter en voulant me perdre dans le ciel. Parce que je ne cesse de confondre la vie et la mort. La joie et la douleur.
Parce que je ne cesse de gravir des montagnes pour atteindre mon but, toucher le ciel... Jusqu'à ce que je me sente mourir... Et je sais alors pourquoi je suis ici. Si la fin est de mourir, laissez-moi mourir à ma manière. Laissez-moi consumer ma vie, au moins elle est feu, plutôt que cendres. Ce qu'on m'a montré de la vie ne me donne pas envie de la vivre. Seuls comptent les déserts, les forêts, les pensées absurdes, les idées folles, les trous dans le temps, les galaxies, les trous noirs, les étoiles lointaines, les battements de coeur, le désir si violent qu'on désirerait qu'il cesse ; seuls comptent les causes perdues, les rêves inaboutis, l'extase, la joie, la joie par-dessus tout, et non le bonheur, la joie, car elle est source de toute vie, elle est début et fin, et non perpétuelle continuité. Elle est l'éphémère, l'éclat, le jaillissement, la désespérance.
J'aime la vie, mais pas la vie qui est faite de survie et de conformité à ce qu'on attend de nous. Survivre, mais à quoi bon ? Plutôt mourir à petits feux des suites du poison.
Je suis redevenue adolescente. Non, la vie ne m'intéresse pas. Pas cette vie-là. Dans me rébellion d'adolescente, je voudrais dire : vous pouvez-vous vous la carrer où je pense, cette vie. Même si je l'accepterai histoire d'avoir le droit de vivre en parallèle ma folie. A moins que je n'en sois pas capable toute ma vie. Je n'en sais rien.
Mais demandez-vous, posez-vous ce dilemme d'Antigone : doit-on dire oui ? Sachant qu'on a le pouvoir de dire non ? Nous avons toujours le choix, entre la vie et la mort. Personne ne s'en souvient aujourd'hui, où la mort est devenue notre pire ennemie. Personne ne se demande pourquoi vivre, qui est une question bien plus importante que pourquoi mourir.
« ANTIGONE :Vous me dégoûtez tous avec votre bonheur ! Avec votre vie qu'il faut aimer coûte que coûte. On dirait des chiens qui lèchent tout ce qu'ils trouvent. Et cette petite chance pour tous les jours, si on n'est pas trop exigeant. Moi, je veux tout, tout de suite , - et que ce soit entier – ou alors je refuse ! Je ne veux pas être modeste, moi, et me contenter d'un petit morceau si j'ai été bien sage. Je veux être sûre de tout aujourd'hui et que cela soit aussi beau que quand j'étais petite – ou mourir.
CREON : Allez, commence, commence, comme ton père !
ANTIGONE : Comme mon père, oui ! Nous sommes de ceux qui posent les questions jusqu'au bout. Jusqu'à ce qu'il ne reste vraiment plus la petite chance d'espoir vivante, la plus petite chance d'espoir à étrangler. Nous sommes de ceux qui lui sautent dessus quand ils le rencontrent, votre espoir, votre cher espoir, votre sale espoir ! »
[Jean Anouilh]

mercredi 30 juin 2010

Another brick in the wall

Les jours qui se succèdent. Les musiques qui tournent en boucle. Les nuits qui se répètent, sombres, dévoreuses. Les vies qui défilent, laides et mutilées. Les moments de lumière. Et puis la lassitude. Lassitude de devoir expliquer, de devoir dire, de montrer, de décrire. Lassitude d'être esseulé ballotté par un courant de fond qui menace sans cesse de faire céder tous les barrages. Et puis, au fond, rien, sinon un vague refus. Je n'ai pas signé pour ça, ce n'est pas ce que je voulais. Comme si quelqu'un se souciait de ce qu'on voulait. Le chemin, les batailles à gagner seul. J'ai l'impression que je pars avec trois fois rien et un avenir tout sauf prometteur. Je regarde autour de moi et ça ne me plaît pas. Je n'y vois que mort et désolation. Ce qui m'aide à tenir parfois c'est la rage qui ressurgit à un moment opportun, vitale et sauvage, qui me redonne le goût de vivre juste pour prouver au monde entier qu'il ne me tuera pas. Et puis c'est la beauté, rare ou abondante selon les jours. Et il me reste moi, et cette philosophie est d'un bien plus grand secours pour moi que les philosophies de l'annihilation du moi, bien qu'il soit possible que ce ne soit pas la meilleure voie pour le bonheur. Que puis-je dire ? Je suis seule avec mes armes dans un monde immense peuplé d'aveugles et de sourds. Je suis seule dans un mur qui m'entoure, et chaque jour n'est qu'une autre brique qui agrandit le mur.

mardi 22 juin 2010

Hellfest report : je suis trop dark

Voilà, je suis rentrée hier du festival de l'enfer, et autant dire que cette année, c'était très rock'n'roll, du point de vue musical et du point de vue du vécu. Beaucoup de hard rock et de groupes de papys qui nous ont prouvé qu'ils avaient encore la pêche (UDO, Saxon, Anvil, Alice Cooper, Kiss...).
C'était un festival où j'ai été curieuse, et du coup, pas mal de découvertes et de surprises à la clé.
J'ai également découvert que je suis définitivement très dark, et je vais vous expliquer pourquoi. Personne n'avait d'appareil photo, aussi je vous prouve maintenant ma darkitude :

1. J'ai découvert que j'aimais le death. Dimanche soir, scandale universel : Nile passait en même temps que Motorhead. Le Hellfest a donc du se diviser en deux camps, ceux qui vont voir "Lemmy" avec ses grosses guitares, sa grosse voix et sa grosse bite (ce type m'agace quelque peu) et ceux qui vont voir le groupe de death brutal inspiré par la mythologie égyptienne. Je ne connaissais pas Nile, et j'ai plutôt adhéré. Une voix qui semble remonter des profondeurs de la terre, un côté mystique et inquiétant qui m'a bien plu. une vidéo de Nile (y en a pas de correctes du Hellfest) :

J'ai également beaucoup aimé Asphyx, groupe de death néerlandais bien léché et puissant :

2. Quand je suis en concert, j'aime me blottir sous la capuche de mon sweat MetalCamp. Quand j'enlève ma capuche, c'est que je suis décoiffée par le concert, que la musique est si bien que ça mérite de bouger la tête dans tous les sens. Deux concerts seulement m'ont fait enlever ma capuche :

Pour les voir, j'ai du braver une foule de plusieurs dizaines de milliers de personnes, car comme je suis grave underground, je n'ai assisté qu'au début du concert de Alice Cooper. ça m'a déçue, c'était trop froid, théâtral, on savait même pas s'il était contente d'être là, et j'ai trouvé ça un peu mou du genou. C'est donc sans regret que je me suis extrait de la foule pour rejoindre les goths qui écoutaient Fields of the Nephilim. C'était juste énorme. Je pouvais sentir la voix du chanteur dans mon ventre. C'était puissant, planant, sombre, classe, aérien.
Une vidéo plus propre pour écouter la musique :

Et l'autre, c'était Tamtrum, une énergie incroyable, un jeu de scène complètement déjanté collant complètement à la décadence malsaine de leur dernier album Fuck you I'm drunk/Stronger than cats :) Du grand n'importe quoi, mais une musique toujours aussi efficace. Pas de bonnes vidéos live du Hellfest, je vous mets donc un autre live pour vous faire une idée de ce que ça donne en concert :

J'ai failli enlevé ma capuche sur :
-Black Cobra : c'est très méchant, on dirait que le batteur va casser sa batterie, il y a juste deux mecs sur scène et ça dégage une haine brutale et ça envoie sacrément en live. Une vidéo studio pour découvrir la musique :

-Sabaton : power metal suédois, ils avaient une pêche d'enfer, c'était joyeux, ça donnait envie de sauter partout, vraiment une super découverte :

une vidéo plus propre :

3. J'aime pas les mainstage. Bien souvent, le son est mauvais, on a du mal à voir quoique ce soit, et cette année avec 65 000 personnes, le festival était tout simplement bondé. Je suis même pas restée 10 minutes au concert d'Eluveitie (pagan). Je voulais du black :) Et quand il y en a eu, Immortal, l'un des concerts que j'attendais le plus, j'ai été un peu déçue : mauvais son, j'arrivais à peine à reconnaître les chansons, et puis, je sais pas, ça manquait de quelque chose (ou alors, j'étais de mauvaise humeur. Cela dit ce sont de petits rigolos qui aiment faire des grimaces, et le maquillage quand même... on dirait Kiss, quoi :)


Deux découvertes live bien sympa :
-Negura Bunget, que je connaissais un petit peu. C'est un black hypnotique, avec des instruments traditionnels, qui change largement de ce qu'on a l'habitude d'entendre. C'était un beau concert, surprenant, simple, loin des singeries de certains groupes de black. Voilà une chanson assez représentative :


-Brant Bjork and the Bros : j'étais très fatiguée, alors je me suis allongée pour écouter, j'ai fermé les yeux, et me suis balladé en Californie au son d'une guitare psychédélique. Vraiment chouette.


Sinon, il fallait quand même que vous voyiez ça, c'était pas mal représentatif de l'état d'esprit rock'n'roll qui régnait sur le festival :


Malgré mon côté dark, je suis redevenue une gamine dimanche soir. J'ai vécu un très grand moment de rock, et assisté à un show véritablement spectaculaire. Je me suis retrouvé à sourire bêtement et à gigoter malgré le fait que je tremblais littéralement de fatigue. Qu'est-ce que c'était ? KISS, bien sûr !
Je vous laisse avoir un aperçu de la performance extraordinaire à laquelle nous avons assisté :
L'entrée en scène :

Je suis fan du bassiste :

Ils savent se faire aimer et acclamer... Une chanson culte avec une mise en scène incroyable.

Une ancienne vidéo de qualité pour un hymne auquel vous adhérerez tous, je crois :)

mercredi 16 juin 2010

Yeahhh

J'avais manqué ça pendant des années. Ecouté un album il y a dix ans. Et putain que c'est bon ! Ce genre de groupe qui a inventé la musique que vous aimez. vous l'écoutez, et vous reconnaissez tous les autres groupes que vous écoutez. Je n'arrête pas d'écouter ça depuis deux jours.
Rock'n'roll !!





jeudi 10 juin 2010

Tout est chaos...

Liberté

Sur mes cahiers d'écolier
Sur mon pupitre et les arbres
Sur le sable de neige
J'écris ton nom

Sur toutes les pages lues
Sur toutes les pages blanches
Pierre sang papier ou cendre
J'écris ton nom

Sur les images dorées
Sur les armes des guerriers
Sur la couronne des rois
J'écris ton nom

Sur la jungle et le désert
Sur les nids sur les genêts
Sur l'écho de mon enfance
J'écris ton nom

Sur les merveilles des nuits
Sur le pain blanc des journées
Sur les saisons fiancées
J'écris ton nom

Sur tous mes chiffons d'azur
Sur l'étang soleil moisi
Sur le lac lune vivante
J'écris ton nom

Sur les champs sur l'horizon
Sur les ailes des oiseaux
Et sur le moulin des ombres
J'écris ton nom

Sur chaque bouffées d'aurore
Sur la mer sur les bateaux
Sur la montagne démente
J'écris ton nom

Sur la mousse des nuages
Sur les sueurs de l'orage
Sur la pluie épaisse et fade
J'écris ton nom

Sur les formes scintillantes
Sur les cloches des couleurs
Sur la vérité physique
J'écris ton nom

Sur les sentiers éveillés
Sur les routes déployées
Sur les places qui débordent
J'écris ton nom

Sur la lampe qui s'allume
Sur la lampe qui s'éteint
Sur mes raisons réunies
J'écris ton nom

Sur le fruit coupé en deux
Du miroir et de ma chambre
Sur mon lit coquille vide
J'écris ton nom

Sur mon chien gourmand et tendre
Sur ses oreilles dressées
Sur sa patte maladroite
J'écris ton nom

Sur le tremplin de ma porte
Sur les objets familiers
Sur le flot du feu béni
J'écris ton nom

Sur toute chair accordée
Sur le front de mes amis
Sur chaque main qui se tend
J'écris ton nom

Sur la vitre des surprises
Sur les lèvres attendries
Bien au-dessus du silence
J'écris ton nom

Sur mes refuges détruits
Sur mes phares écroulés
Sur les murs de mon ennui
J'écris ton nom

Sur l'absence sans désir
Sur la solitude nue
Sur les marches de la mort
J'écris ton nom

Sur la santé revenue
Sur le risque disparu
Sur l'espoir sans souvenir
J'écris ton nom

Et par le pouvoir d'un mot
Je recommence ma vie
Je suis né pour te connaître
Pour te nommer

Liberté

Paul Eluard
in Poésies et vérités, 1942


Un poème encadré chez ma grand-mère et dont les mots restent toujours aussi puissants en moi.

Par ailleurs, savez-vous qui était Brian Boru ? Un roi irlandais qui repoussa les vikings. Il a laissé derrière lui un air populaire souvent repris...
Enfin, là je tombe sur une tentative de mise en musique d'Eluard absolument épouvantable, terrifiante, horrible, torturante

Au secours !!!!!!!!

On écoute ça et ça va mieux

Ouf !

Ou pas. ça dépend des goûts, je suppose.
Regardez tout de même cette très belle vidéo (en HD et le son à fond s'il vous plaît, ça vaut vraiment le coup) :



Oui, ça sera tout. Et tant mieux si ça n'a aucun sens.

Ah, non.

Pour vous faire découvrir un peu mon univers, tjrs en HD (enfin j'ai pas trouvé en HD, mais mettez la meilleure qualité possible s'il vous plait) :


ou encore :


Mais par contre c'est des saletés de hordeux qui chantent, normal que ce soit aussi neu-neu

ou encore, mieux :


Et enfin, voici mon perso :)
http://eu.wowarmory.com/character-sheet.xml?r=Uldaman&cn=Maloriel
Faites un zoom avant vous verrez comme elle est belle :)

lundi 31 mai 2010

flots de mots

Oui, j'ai besoin de mes moments de solitude, c'est ce dont j'ai le plus besoin au monde. Car la chose qui pousse en moi a besoin d'attention. Elle est là même si je n'y pense pas. Et un jour elle rugit et se débat, et parfois c'est trop tard, j'ai désappris à l'apprivoiser, alors je suis perdue et sombre dans le doute. C'est pour l'apprivoiser que je suis venue ici, en tirer les histoires qu'elles me suggèrent, suivre les rêves qu'elle fait glisser dans mon ciel intérieur. C'est pour me laisser mener dans des imaginaires qui ne s'épanouissent qu'à l'ombre de la solitude que je suis venue. Pour écouter le chant de l'aurore et la mélancolie du soir. Pour saisir les gouttes de rosée et les parfums du printemps qui continue sans nous, indifférent à nos états d'âme, à déployer sa beauté. C'est pour me pister, pour retrouver l'écho lointain de ces voix, de ces pas, qui résonnent sur le pavement des nuits d'insomnie, sur les chemins effrayants qu'ouvre un rayon de lumière, menant dans l'inconnu, dans la folie, la démesure de mon désir qui menace toujours de détruire ce que je pourrais créer. Il hurle et trépigne comme la petite fille que je suis toujours, parfois je le noie dans l'alcool où parviens à le détourner en endormant mon esprit à d'autres occupations. Mais il finit toujours par revenir, et quand je m'y attends le moins, il hurle le besoin de créer, mais il est trop impatient et étouffe les nouveaux-nés...
J'avais seulement besoin d'être seule, ne serait-ce qu'une journée, et déjà, j'ai retrouvé des mots, des pensées, des horizons, des désirs. C'est étonnant, à quel point j'en étais coupée. Je ne veux plus reproduire cela. Que j'ai toujours mes instants, mes aurores. Que je parte seule dans la forêt, que je retienne la nuit, que je me laisse aller à mes désirs de lumière. Que je prenne la mer. Que je sois seule avec le ciel. Je ne laisserai plus une telle folie me réduire, car quand cela arrive, c'est tout qui diminue en moi, même mon amour. Je le sais. Je suis ainsi. Cyclique, à moitié folle, lunatique, éprise, éperdue. Maintenant, je le sais, et je n'en ai plus peur, plus comme avant. Retrouver ces moments au bord du vide, tellement essentiels, où la vie s'arrête et où tout se produit en même temps.
Un peu de mal à retrouver mon équilibre. J'ai toujours cette espèce de nervosité qui me fait agir trop vite. J Rassembler ces fragments épars d'impression, prendre le temps de les contempler. Je vais boire cette bière sur le balcon, avec la musique qui évoque en moi un long rêve éveillé, cette longue fresque d'Howard Shore...
Ce qui fait la beauté des choses, c'est ce que nous y mettons, de nous-mêmes. Parfois, les autres le voient rayonner. Dans ce thème du Rohan, je vois Eowyn, tout ce qui fait son être, sa mélancolie, son courage, sa sauvagerie, son désir. Elle met de la lumière à ce thème, et elle y met de la douleur. Mais une douleur qui flamboie et qui triomphe.

Je me sens curieusement émue ce soir, lassée, énervée, secouée. La gorge serrée et douloureuse. La musique que j'écoute me bouleverse, comme si, vous savez, certains soirs, on était ouvert,

à fleur de peau

au bord de nous-mêmes

à portée de tir, à bout de souffle, à tombeaux ouverts, au bout du rouleau,
à la croisée des routes, au bout du quai, à l'aube d'une nouvelle ère, à l'autre bout du monde, à l'heure d'hiver à l'heure d'été, à la manque,

à l'ouest

à la folie.

Je serre des deux mains l'entaille profonde par où pulse mon sang, dégorge ma poitrine, crève mon coeur, et pourtant, le monde est douceur...

Je voudrais être la voix qui saurait provoquer l'apocalypse, je voudrais être la violence qui t'arrachera les yeux, je voudrais être le rythme primitif qui cascade dans nos cauchemars et fait de nous des enfants terrifiés.

Je voudrais apprivoiser le démon afin de m'unir à lui et confondre nos chairs, de manière à ce que sa puissance surnaturelle soit les ailes de ma dérisoire vengeance...
Je voudrais être ton hurlement, je voudrais être la tombe sur laquelle tu marches, je voudrais te recueillir au creux de mes entrailles, afin peut-être de t'enfanter à nouveau.

je voudrais, je voudrais, je voudrais

Je voudrais creuser les artères vitales, tomber dans tous les terriers du monde, habiter le creux des vagues et les cavernes de nos mémoires, je voudrais arracher l'écorce pour demeurer dans la terre et les arbres, je voudrais qu'une guerre souffle nos lâchetés, qu'un cataclysme force nos âmes à paraître et à jouir enfin, je voudrais que la mort nous poursuive pour que nous puissions courir, je voudrais que la maladie nous terrasse pour que nous puissions nous relever, je voudrais déchaîner l'enfer pour que nous puissions y retrouver nos souvenirs aimés...



Faire parler le silence
écouter ses longs monologues
doucement descendre
jusqu'aux nuées noires
doucement descendre

Qu'est-ce qui te retient soudain ? A l'angle de ton regard apparaît une larme. Pourquoi t'arrêtes-tu ? Tu t'égares immobile, au beau milieu du songe qui t'éveille... Que vois-tu ? Moi, je vois s'ouvrir le ciel, en bas. J'y ai longtemps aspiré...
Des fleurs inversées y ondoient, des lumières s'y croisent comme dans les vitraux d'une cathédrale. Peut-être est-il temps. Alors que je me déshabille de ces choses qui font la vie, et me revêts de pluie, tu n'oses pas encore avancer. Mais où vas-tu ? Tu ne peux pas remonter. Là-haut c'est l'abîme et le néant, là-haut c'est ta mort que tu abandonnerais comme un vieux vêtement.
Je ne suis pas venue pour relever les morts. Je suis venue pour me relever de la vie.
We're one, but we're not the same...

lundi 15 mars 2010

Une chose à ajouter au billet précédent

Un hommage, un remerciement, à Hans Zimmer. Sa musique sait incarner le drame, le tragique. L'histoire. L'humain quand il meurt ; quand il prie, quand il aime.
C'est une source d'inspiration inépuisable pour moi ; il faudra que je lui dise merci, personnellement, un jour.
Mes mots sont tellement idiots. Ecoutez, essayez, s'il vous plaît, de sentir le drame. Une vie qui se joue, un dénouement, une fin, un commencement. C'est cela, le drame. Saisir l'intensité de l'instant, dans sa vérité autant que dans sa simplicité. Ce que Hans Zimmer a fait en musique, je veux le faire en littérature ; ambition sans doute un peu exagérée pour mes capacités, je le sais bien, mais ça vaut le coup d'essayer.







Mes trois grands classiques. Merci à lui. Je rêve d'avoir un studio comme lui, un jour, sauf que ce serait pour écrire, bien sûr (http://www.for-tune.de/de/images/hanszimmer.jpg)

House of the rising sun

Drinking : rosé
Listening : Loreena McKennitt - Mummers' Dance ; Cruachan - Ride on ; Corvus Corax - Suam Elle Ires ; Nine Inch Nails - Something I can never have (album version, terrifiant, je trouve...); Hans Zimmer - Now we are free ; The Old Dead Tree - Everyday life ; The Animals - House of the rising sun ; Sia - Breathe me ; Saez - Delphine et Hyppolite ; Ludivico Einaudi - Primavera

Avez-vous l'impression que parfois chaque jour, et en particulier, chaque soir, est une lutte ? Contre le vide, contre l'angoisse, contre l'apathie. J'épice mon univers de musique et de vin. J'ai écrit, ce soir, mais chaque fois que j'écris ; j'ouvre la boîte de Pandore. Des émotions me sautent au visage, anciennes et neuves, sans mélange, brutales. Cela me fait un peu peur. Je crois que j'ai besoin d'une bulle de temps et de silence, chaque jour, si je veux écrire. Car très vite je suis perdue, à la dérive entre deux mondes, et je ne peux aisément revenir à la réalité, et ne suis alors disponible pour personne, sauf peut-être un esprit bavard, lunatique et rêveur qui se trouverait sur la même longueur d'onde que moi à ce moment. Ce qui n'arrive donc que très rarement. Je me perds si vite et si facilement. Je décroche. J'ai une armée de rêves et de souvenirs qui se battent en duel dans mon ciel intérieur trop changeant. La musique me nourrit et me sculpte à coups de haches. Je change d'apparence à mesure que s'écoulent les notes. Il faudrait que je sache assumer cette dérive intérieure, mettre un panneau : "c'est plus la peine de m'approcher, à moins que tu me parles en langage surréaliste." Vous comprenez ? Des fois je m'en veux de m'exiler si facilement. Et encore, je dis ça, mais non, ça n'est pas facile. Il me faut parfois des heures pour féconder la nuit entière.
Disons que cette attitude me semble parfois narcissique. Mais je n'y peux rien. Mais je me sens toujours coupable.
Et c'est fragile, si fragile. le charme s'évapore trop vite. Ce n'est pas tout à fait compatible avec le solitude totale ; la preuve, j'éprouve le besoin d'écrire ici. Ce n'est pas non plus compatible avec le quotidien et les masques. Car quoiqu'on en dise, on en utilise tous, tout le temps. C'est compatible avec la fureur de vivre. Et c'est tout.
Quand ça vient, le monde me semble soudain étranger, comme dans un rêve. Tout me paraît démesuré et infini. C'est pourquoi souvent j'en appelle à Dionysos. Les Grecs avaient un nom pour l'ivresse (et je parle d'une ivresse plus spirituelle que celle qu'induit l'alcool, l'alcool ne fait que soutenir et parfois épanouir cette ivresse-là). Il nous manque un nom pour ça. Il nous manque un espoir pour le faire vivre (lapsus, je voulais dire un espace, mais les deux mots conviennent...) Les chantres de l'imaginaire n'en ont pas plus qu'un cadre trentenaire dynamique. Il manque quelque chose. Putain, vous trouvez pas qu'il manque quelque chose ?
Un soir comme ça j'ai envie de vous écrire la plus belle tragédie que vous ayez jamais lu... Mais ça ne se fait pas sans travail... Du coup, j'ai envie de vous donner des poèmes, des paroles qui me semblent paroles d'évangiles... Mais, non. C'est ainsi. Une écriture est faite d'hésitations et d'angoisse. Que cela reste ainsi.
Tout cela est très décousu je le sais bien, mais je ne peux faire mieux. De toutes façons, personne n'est obligé de lire, ce qui me délivre a priori de toute culpabilité de raconter absolument tout ce que je veux. Mais tout est "a priori" dans ce monde, même les valeurs les plus fondamentales...
Je veux élaguer la vie. La rendre à sa pure nécessité, à sa beauté. Primitif et orgueilleux. Qu'est-ce qui restera de nous ? Pour ma part, ce sera quelques soirées de beuverie, quelques couchers de soleil, quelques baisers, quelques concerts. C'est presque tout. Que reste-t-il ? C'est une question qui m'obsède, lorsque le quotidien s'encombre d'inutile. Quelques saveurs, une odeur de pin, l'air du soir en plein été lorsque la rosée est tombée. Quelques chansons qui tombent dans le silence. Quelques personnes à la lisière, même si je sais que everyone goes away, in the end...
Je ne peux supporter de laisser tout en l'état. Il faut sans cesse que je transforme, que je sculpte, que je dise. ça me fait autant de mal que de bien ; j'en ai l'impression certains soirs, surtout ceux-là, où le chemin qui m'emmène va plus profond dans la mélancolie. La nostalgie y joue aussi, étrange. Je ne suis pas vieille, ce ne sont pas mes vingt ans que je regrette. Et pourtant, je suis sure de connaître ce sentiment. Qui dépasse des années, des villes, des personnes. C'est difficile à exprimer.
Voilà, il ne reste plus rien de tout cela qu'une vague incertitude. Parfois je me dis que la seule manière d'aller jusqu'au bout de mon vertige, ce serait de mourir. Je n'ai pas envie de mourir. Mais comme je mourrai un jour, j'aimerais que ce soit comme cela, appelée au-delà de moi-même par la musique et la poésie.

"On ne peut ici-bas contenter qu'un seul maître!"
Mais l'enfant, épanchant une immense douleur,
Cria soudain: "Je sens s'élargir dans mon être
Un abîme béant; cet abîme est mon coeur!

"Brûlant comme un volcan, profond comme le vide!
Rien ne rassasiera ce monstre gémissant
Et ne rafraîchira la soif de l'Euménide
Qui, la torche à la main, le brûle jusqu'au sang.

"Que nos rideaux fermés nous séparent du monde,
Et que la lassitude amène le repos!
Je veux m'anéantir dans ta gorge profonde
Et trouver sur ton sein la fraîcheur des tombeaux!"

- Descendez, descendez, lamentables victimes,
Descendez le chemin de l'enfer éternel!
Plongez au plus profond du gouffre, où tous les crimes,
Flagellés par un vent qui ne vient pas du ciel,

Bouillonnent pêle-mêle avec un bruit d'orage.
Ombres folles, courez au but de vos désirs;
Jamais vous ne pourrez assouvir votre rage,
Et votre châtiment naîtra de vos plaisirs.

Jamais un rayon frais n'éclaira vos cavernes;
Par les fentes des murs des miasmes fiévreux
Filtrent en s'enflammant ainsi que des lanternes
Et pénètrent vos corps de leurs parfums affreux.

L'âpre stérilité de votre jouissance
Altère votre soif et roidit votre peau,
Et le vent furibond de la concupiscence
Fait claquer votre chair ainsi qu'un vieux drapeau.

Loin des peuples vivants, errantes, condamnées,
À travers les déserts courez comme les loups;
Faites votre destin, âmes désordonnées,
Et fuyez l'infini que vous portez en vous!

Baudelaire: Les Fleurs du mal, Femmes damnées (1861)