Des heures que je n’ai pas réussi à écrire quoi que soit,
paralysée. Je me dis que peut-être, au lieu de chercher désespérément une
solution, je dois me laisser entraîner. Traverser l’épreuve jusqu’au bout.
Peut-être que si je me dis que rien ne marche et que ça finit toujours par
revenir, c’est parce que j’essaie toujours de m’échapper.
Je me sens complètement adolescente, à tout refuser, à fumer des clopes en écoutant de la
musique très fort.
Ce besoin de fermer les yeux, de perforer ma poitrine pour
laisser sortir la bête, le feu, la lumière. Ces moments désespérés où je me
sens anéantie par cette puissance que je ne sais pas utiliser. Qui me submerge.
Impuissance, impuissance, impuissance. Ma vieille amie. L’impuissance, c’est de
l’énergie sans emploi. Tellement sans emploi qu’on finit par douter que la
puissance se trouve vraiment quelque part en soi.
Tout est volonté de puissance. C’est l’essence de la vie. Nietzschéenne
jusqu’au bout. Volonté en mouvement. La mort c’est l’enfermement de cette
volonté en soi. Tout n’est que réalisation de cette finalité sans fin :
exercer sa puissance. Qui ne veut pas forcément dire domination, d’ailleurs, n’en
déplaise aux détracteurs de Nietzsche.
Arrogance, orgueil démesurés. Mais si c’était ça, ma vraie
nature ? Je ne suis pas douée pour accepter, finalement. Je renoncerais
plus facilement que j’accepterais. Essayer d’accepter, ça s’est révélé être un
échec spirituel. Ce n’est pas ça que je veux,
ça n’est pas compatible avec la bête, le feu, la lumière.
Ils ne font pas de moi quelqu’un d’important, j’essaie de le
comprendre. Mais ce sont eux qui font que je suis vivante.
Ils sont douleur, joie, désir et tristesse. Dans mon petit monde
possiblement ridicule et étriqué, ils constituent ma force vitale. Si les aléas
de l’existence m’en laissent la possibilité, peut-être que je finirai par
changer d’avis. Mais jusqu’ici, ils ont toujours fini par gagner.