lundi 22 décembre 2014

Double vie

 

Le fil ténu se dérobe sous mes pieds de funambule.
Double vie...
Je tente un exercice d'équilibriste pour ne pas chuter dans mes propres contradictions.
À ma droite, une gueule béante.
À ma gauche, une gueule béante.
Double vie.
Chaque jour, aller tout en haut, puis rouler au bas de la pente.
Lutter pour respirer en plein constat d'impuissance.
Lutter pour dompter les mots quand ils apparaissent soudain comme l'unique porte de sortie.
Être quelqu'un le jour.
La nuit être à nouveau enfant, adolescente, et adulte à la fois.
Gérer la montée. Plus dure que la descente.
En moi. Ça se lève. Embrase et dévore tout.
La peur. La sensation de ne pas trouver où se caser. Se demander si on en a envie.
La seule certitude : quand je côtoie ces seuils-limites, de chaque côté de l'abîme, je sais que c'est ce que j'emporterai dans la tombe. La seule chose qui importe. Si je croyais à l'âme, elle serait là-dedans : dans cet instant où je perds le contrôle.
J'ignore ce que ça signifie et si ça doit signifier quelque chose.
Je sais simplement que chaque fois que je perds l'équilibre, je retrouve quelque chose d'essentiel.
Quelque chose de pur qui a le goût de l'éternité et des occasions manquées.

lundi 11 août 2014




J’ai besoin de retrouver une dimension sacrée à ma vie. De cultiver mon jardin. J’ai besoin de quelque chose de plus essentiel, de plus pur. De cesser d’être à la dérive.
L’année dernière, je m’apprêtais à faire le grand saut et à partir en Inde. J’ai surmonté beaucoup de choses pour cela.
Peut-être est-il temps de le faire de nouveau. De passer par-dessus moi-même. Pas de cette façon-là, non, cette fois, ce sera différent. J’ai passé une année étrange, tissée d’incertitudes, de doutes, de questions, de remises en question. Une année d’errance. Je sens que j’ai besoin de retrouver une part de moi vitale, quelque chose que les pierres du temps et du quotidien masquent et étouffent peu à peu. Quelque chose que j’ai toujours eu en moi, cette chose qui s’éveille et frissonne au contact des grands espaces et de la musique.
J’ai un besoin profond, dont je n’avais pas encore saisi toute l’ampleur et la signification, de me ressourcer.
J’ai besoin de revenir dans mon corps. Ma sensibilité et ma sensualité sont émoussées, endolories, léthargiques. J’ai le cœur lourd, souvent. Moins d’angoisse, plus de tristesse. Ma tristesse est fondamentale, constitutive, je crois, mais mal canalisée, elle m’entraîne par le fond au lieu de simplement m’accompagner.
J’ai besoin de rêver à nouveau, de me mettre en quête des signes. De laisser se déployer cette immense sérénité, comme laisser l’océan entrer en moi.
Comme si aujourd’hui j’éprouvais le poids de ma carcasse, comme si ma peau était parcheminée et encrassée, et que je voulais me déshabiller de mon enveloppe.
Le temps est venu pour un changement, même si je ne sais pas vraiment encore de quelle nature il est.
J’ai besoin d’écouter le son de la pluie. De passer des heures de rêverie à tenter de déchiffrer la lumière sur les nuages et les feuillages. Besoin de respirer un air riche, bourré de senteurs.
C’est comme si ma tête était une gare désertée. Il n’y a plus que moi sur le quai. Assise sur un banc, je scrute les rails vides.
Je ne veux pas passer ma vie comme ça, assise sur ce banc avec le bitume sous mes pieds. Parce que sur ce banc, je commence à avoir terriblement froid.

mercredi 28 mai 2014

Madame Nostalgie




Aujourd’hui j’ai eu une bouffée de nostalgie en regardant un lycéen dans le bus, dont j’aurais été sans doute amoureuse à dix-sept ans. Un petit blond aux cheveux longs et aux yeux verts, portant un pendentif viking, avec ce regard clair, assuré, intense. Je me sens un peu vieille en éprouvant une tendresse instinctive à son égard.

J’ai changé sans changer, au fond je suis toujours la même, la seule différence c’est le temps, toutes ces batailles qui me séparent de mes dix-sept ans. Il y a dix ans. J’étais parfaitement insouciante, à moitié malheureuse, et follement amoureuse. J'éprouve une véritable nostalgie, saisissante, en évoquant cette année-là. Ce ne sont pas des regrets. Juste de la nostalgie, une étrange mélancolie teintée de bonheur et de désir d’encore. Cela me rappelle que c’est toujours ainsi que je veux vivre. Et aujourd’hui je peux me dire avec sincérité que je ne m’en suis pas trop mal sortie. Au beau milieu des déconvenues, ça fait du bien. Chaque fois que je suis perdue, je me replonge dans mes dix-sept ans. Je bois à satiété de ces mélodies adolescentes, de ces envies d'ailleurs, de cette folie pure qui me tenait lieu de cerveau.
Toujours, tête nue sous le ciel, nourrie de pluie et de vent, toujours cet être qui n'en finit pas de naître, qui se déplie membrane après membrane, perpétuellement exposé, fragile, et qui s'éprouve pourtant comme infiniment puissant, parce que la lumière que je cache sous mes côtes menace d'exploser à chaque battement de mon cœur.

dimanche 27 avril 2014

Je ne sais pas comment vivre




I'm not like them
But I can pretend
The sun is gone,
But I have a light
The day is done,
I'm having fun
I think I'm dumb
Or maybe just happy

My heart is broke
But I have some glue
Help me inhale
And mend it with you
We'll float around
And hang out on clouds
Then we'll come down
And have a hangover

Sit in the sun
Fall asleep
Wish away
soul is cheap
Lesson learned
Wish me luck
Soothe the burn
Wake me up


Envie de vivre tout cela à nouveau, de trouver des chemins cachés. Je ne vis que par et pour l’intense, le quotidien au final m’use certainement davantage que ces moments à vif, ces instants d’absolu qui ont le pouvoir de me faire sortir de moi-même. Inlassablement, dans une quête sans fin, je cherche à les recréer. À ouvrir d’autres passages. Aller plus loin dans ma quête. Peut-être est-il temps que je recommence à lire Castaneda. Et Mathieu Ricard. Je veux percer les voiles. Aller à l’essentiel.
Ricard s’adresse souvent aux personnes qui travaillent et ont peu de temps, parce que ça leur est plus difficile de pratiquer la méditation. Mais je pense que c’est au moins aussi difficile pour eux que pour ceux qui vivent sans repères, détachés, errants, dans une presque entière solitude.

Chaque fois j’ai cette sensation qu’il y a quelque chose de bien précis que je peux/que je dois exprimer. Et je pars en quête de cette chimère fugitive.

Tous ces univers qui se mélangent en moi et dont je peine à extraire la quintessence, pour créer ma propre beauté… Les rêves se fondent et moi et se mélangent, les miens, et tous ceux des autres, qui prennent la teinte et la saveur de mon propre onirisme… Peut— être oui pourrais—je y passer la nuit, mais mon esprit d’y perd, et l’expérience est fugitive ; la sensation, volatile…

Ressusciter les anciens rêves est un rituel qui ne s’accomplit pas en un seul jour. Et pourtant on le voudrait, tant la sensation est étourdissante. Lorsque l’on se sent renouer, fibre après fibre, avec ces spectres innombrables qui hantent l’imaginaire…

Je fais très souvent cette sorte de cauchemar où je suis soit au Hellfest, soit à Sanary (dans la maison de ma grand-mère). Peut-être que ces endroits symbolisent une sorte de paradis, l’un dans la communion et l’absolu, l’autre dans la solitude et la contemplation. Mais chaque fois, dans ces rêves, le temps m’échappe, et je dois partir avant même d’avoir pu vivre l’instant. Ce sont des rêves de frustration et parfois de désespoir. Ils viennent souvent. J’essaie toujours de comprendre ce qu’ils me disent quand, bien souvent, j’ai la sensation de ne pas pouvoir vivre ma vie comme je le voudrais. Au fond, je sais sans doute ce qu’ils me disent. J’ai toujours cru que les circonstances extérieures ne constituaient que des prétextes, des justifications que l’on brandit pour s’excuser d’avoir oublié. Et pourtant retrouver le chemin de sa propre vie est bien souvent un calvaire, une quête labyrinthique. L’on se perd et l’on se lasse en route, bien avant ne serait-ce que d’approcher du but…
Parfois je me dis que la vie est aussi compliquée que l’amour. Ce que j’espère maintenant, c’est que les choses finissent par se dénouer, se fluidifier.
Pendant longtemps, pour moi l’amour a été un parcours du combattant, une épreuve sans cesse renouvelée. On me disait, « ça devrait être plus simple ». Et finalement, ça l’a été. Finalement. Est-ce que ça sera pareil pour la vie ? Combien d’années encore à livrer un combat quotidien simplement pour garder la tête hors de l’eau ?
Ces réponses sont probablement en moi. J’espère les trouver. J’y travaille. Car de la même façon que l’amour m’a amenée aux portes de l’enfer, j’espère de même que ma quête de réponses, et d’un semblant de sérénité, me fera visiter toutes les contrées de la destinée avant que je ne trouve enfin un moyen d’exister.